Bruno Rossignol, militant pour la légalisation

Olivier F
08 May 2023

Bruno Rossignol est un militant de longue date pour la légalisation du cannabis, cofondateur du CIRC (Collectif d’information et de recherche cannabique) de Nantes. Après un long parcours dans le domaine du cannabis et du militantisme, il fait aujourd’hui appel aux professionnels et aux activistes pour l’organisation de deux événements : l’Appel du 18 Joint à Paris et un tour cycliste en Bretagne pour protester contre les tests salivaires au volant et les retraits de permis totalement injustes.


SSFR : Quand es-tu rentré en contact avec le monde du cannabis ?
 
Bruno Rossignol : Je suis parti aux Pays-bas à l'age de 21 ans pour des raisons professionnelles, j’étais cuisinier. Mais ma vie dans le milieu cannabique a commencé quelques mois plus tard, lorsque le propriétaire de mon logement m'a proposé de travailler pour lui. En effet, mon studio était situé au dessus de son coffeeshop et il cherchait quelqu'un parlant hollandais pour remplacer un de ses barmen qui devait partir. Il m'a payé la formation dispensée par l'UCB (Union Cannabis Band), le syndicat des tenanciers de coffeeshop à l'époque, qui se déroulait au Cannabis College d 'Amsterdam. Après cette formation, j'ai pu intégrer l'équipe du coffeeshop « The Game » à La Haye. Au bout de quelques mois, mon patron m'a proposé de travailler dans les plantations, avec une bonne équipe de growers, ce qui m'a permis d'apprendre les rudiments de la culture du cannabis en intérieur .
 
Quel type de culture ?
 
C’était les débuts de la culture hors sol et les prémices de l'hydroponie... Et au vu des résultats, il était clair que cela deviendrait un des modes de culture les plus utilisés et ça a bien été le cas. Cela signifiait aussi : fini la pénibilité de monter des sacs de terreau au quatrième sans ascenseur ! Et les jardins deviennent aussi plus propres avec beaucoup moins de poussière de terre, et aussi plus discrets sans avoir à transporter les sacs de terreau. A première vue, le principe peut paraître complexe,mais s'avère très simple à maîtriser.
 
La culture hydroponique a souvent été critiquée…
 
Comme toutes les innovations, cette technique avait ses détracteurs depuis les années 90. Selon eux, cette façon de cultiver modifiait les goûts, l’usage de « boosters » transformait les plantes et elles avaient absolument besoin de la terre pour bien grandir et développer toutes ses saveurs. Je vous répondrais « peut-être » mais en sachant qu'une plante a besoin de 100 litres de terre riche pour bien se développer, c’est juste très compliqué en intérieur, alors qu’en hydroponie un litre de solution nutritive par plante est suffisant. La solution est complète et contient tous les nutriments dont la plante a besoin.
 
L'un des autres avantages est la disparition des maladies et des nuisibles qui étaient amenés par la terre, (araignées rouges ,thrips...) et qui contaminaient tout l'espace de culture. Il est plus simple de contrôler ce dont les plantes ont besoin en mesurant l'EC de la solution nutritive sans avoir à attendre que ce soient les feuilles qui donnent le signal d'un souci. A l’époque, on travaillait principalement avec Sensi Seeds, Dutch Passion et Greenhouse qui étaient les meilleurs breeders du moment aux Pays-bas.
 
Tu es ensuite revenu en France…
 
Après 5 ans passés à La Haye, je suis en effet revenu en France. Voyant les lois sur le cannabis dans notre pays et l'urgence de changer les choses, je me suis rapproché du CIRC Bretagne, créé par Arnaud Debouté, fondateur du « Jardin de poche » à Guingamp. A partir de ce moment, mon parcours de militant a commencé, en participant et en apportant mon aide aux événements organisés par le CIRC, entre autres, l'Appel du 18 joint.
 
Après quelques années, Arnaud ne souhaitait plus s'occuper du CIRC, et moi, j’ai été contraint de partir m'installer sur Nantes. J'ai créé alors le CIRC Nantes avec Jef et Eric, aujourd'hui malheureusement tous deux décédés. A partir de ce moment j'ai rencontré d’autres personnes membres d'autres associations, toutes dévouées à une légalisation.  
 
Ainsi, j'ai rencontré par exemple Farid, fondateur de Cannabis Sans Frontières, à l'occasion d'un procès pour Eric ( lorsqu'il avait porté plainte pour le vol de sa récolte ). Il est également l'organisateur de la Cannaparade à Paris et un soutien du CIRC Ile de France pour l'appel du 18 Joint .
 
Quant à Dominique, je l'ai rencontré la première fois a une manif contre l'aéroport de Notre dame des Landes, où je me suis retrouvé distributeur du journal RBH entre black blocks et CRS ! Enfin, quand on connaît le monsieur, on ne peut pas s'attendre à rien ! Dominique est aussi le fondateur des premiers Cannabis Social Clubs (CSC) en France. Par leur intermédiaire, j'ai pu rencontrer d'autres activistes .

Rossignol, militant pour la légalisation
Un dessin original aux environs de Tain-l’Hermitage, photographié par Bruno durant son Cannabike tour en octobre 2022.

Que penses-tu de la situation actuelle ?
 
Bien que nous ayons tous le même but et la même envie, c'est à dire la légalisation du cannabis, les groupes ou autres associations des plus diverses et variées se sont multipliées avec les réseaux sociaux. Je trouve cela très dommageable car la quantité de personnes concernées par ce combat s'en trouve divisée. Ainsi, le CIRC en a fait les frais et le nombre de ses adhérents s'est effondré. Je pense qu'aujourd'hui il est temps de se fédérer pour retrouver la force de se faire entendre et d'avoir un poids réel pour changer les choses, car même si les lois s'assouplissent sur certains points, tel que le CBD, il y a encore un long chemin a parcourir avant la légalisation.
 
 Tu as toi-même été une victime de la prohibition ?
 
J'ai subi un test salivaire, qui a entraîné la suspension de mon permis. Pour le récupérer, à moi de montrer patte blanche avec des résultats d'analyses urinaires négatives au THC. J’ai donc du cesser toute consommation pendant un mois. Pour faciliter cette période d’abstinence, je suis parti durant un mois faire un tour en vélo en partant le mardi suivant la French Cup de Calafell, de Perpignan, pour arriver à l'Underground French Cup (lieu tenu secret), J'ai traversé de nombreuses villes : Avignon, Valence, Montélimar, Le Puy en Velay, Saintes, Limoges, entre autres, et rencontré de nombreux professionnels dans le milieu du cannabis : gérants de growshop ou d'officine de CBD, producteurs,  transformateurs, distributeurs, ouvriers agricoles... J'ai aussi rencontré beaucoup de personnes souhaitant avoir plus d'information sur le cannabis, sans en être des consommateurs mais curieux.
 
Tu comptes organiser un autre bike tour en Bretagne..
 
Ayant réussi dans ma démarche, j'ai envie de réitérer ce périple pour aider les personnes qui rencontrent le même problème que moi, avec les conséquences que cela entraîne ( travail, vie quotidienne etc...). J'ai donc l'idée d'organiser un Cannabike Tour en Bretagne durant le mois de Mai (départ de Rennes le 9 Mai pour un retour le 8 Juin) réunissant une dizaine de personnes. Le but de ce tour de Bretagne est de se décrasser l'organisme pour réussir les analyses et aussi pour rencontrer des acteurs du milieu chanvrier en Bretagne, des producteurs des transformateurs des distributeurs, des activistes, et encore d'autres personnes improbables au long de la route et également à certaines occasions de parler des bienfaits du cannabis et faire connaître le CIRC à la nouvelle génération d'usagers. J'attends que les volontaires me contactent afin de calculer au plus près le coût du périple et de demander de l'aide aux sponsors éventuels. Ce sera un voyage découverte en parcourant toute la Bretagne et quelques îles. Bien que situé entre la Bretagne et la Normandie, suivant la marée, nous commencerons par le Mont Saint Michel. Puis, nous irons de Saint-Malo à Brest en longeant la côte.

Peux-tu aussi nous parler de ton projet pour l’Appel du 18 Joint ?
 
Parallèlement à ce tour de Bretagne, je souhaite organiser un autre événement, significatif de mon engagement dans cette cause, mais de façon différente par rapport aux dernières années : L'Appel Du 18 Joint. J'aimerais que cet événement se déroule sur deux jours le samedi 17 et le dimanche 18 Juin. Le samedi pendant la journée je voudrais mettre en place un salon du cannabis sous toutes ses formes, avec des exposants de différents domaines d'exploitation de la plante : textile, alimentation, CBD, cosmétiques et encore bien d'autres. Il y aussi les brasseurs, les distributeurs de graines, d’articles pour fumeurs, les growshops ou même une entreprise spécialisée dans la construction et l'isolation avec le chanvre. Pour les informations que les visiteurs pourraient chercher, j'aimerais bien avoir la présence d'autres associations comme Principes Actifs, NORML, ou autres.
 
Le soir, ce serait super d'organiser une soirée de soutien avec des artistes reconnus et engagés comme Billy Ze Kick, Les Ramoneurs de Menhirs, Yanis Odua, Gromans, et autres que nous serions ravis d'accueillir. Le dimanche, on se retrouve pour une marche traditionnelle du 18 Joint avec arrivée à La Villette, comme d'habitude. Pour pouvoir organiser ce week-end de manifestations, je lance un appel aux bonnes volontés, aux professionnels qui souhaitent y participer, et aux personnes qui souhaitent faire évoluer les choses. Contactez moi. Je lance un appel urgent pour trouver une salle à moindre coût pour ces dates.en banlieue proche de Paris
 
Contact :  bayerossignol@gmail.com

Bruno Rossignol, militant pour la légalisation
Le prochain CannaBike Tour se déroulera en Bretagne.
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