Dr Céline Nicole-de Groot, chercheuse spécialisée dans le cannabis et la lumière

Olivier F
31 Mar 2024

Céline Nicole-de Groot est un chercheuse française expatriée au Pays-Bas, spécialisée dans l’interaction entre la lumière et le cannabis. Elle travaille notamment dans des centres de recherche qui regroupent plusieurs marques du secteur et où le cannabis est cultivé dans un but scientifique. Céline est une chercheuse passionnée qui travaille pour Signify, une entreprise spécialisée dans la lumière pour tous les usages qui commercialise ses produits sous la marque Philips.


SSFR : Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?
 
Dr Céline Nicole-de Groot : Je m’appelle Céline Nicole-de Groot et je suis française. J’ai étudié la science à Paris, à l’Université Pierre et Marie Curie. Ensuite, j’ai fait une thèse en  physique à Toulouse. Puis, un post doctorat à Amsterdam, ce qui m’a amené à travailler pour le centre de recherche de Philips depuis 2001. J’ai commencé à travailler sur la lumière en interaction avec les humains et les plantes. Depuis environ 15 ans, je me suis spécialisée dans la lumière pour les plantes. Au début, il ne s’agissait pas de cannabis. Je travaillais sur les plantes pour l’alimentation. Et depuis 5 ans, je fais de la recherche focalisée sur le cannabis. J’habite aux Pays-Bas mais je travaille aussi en France, en Suisse et au Québec.
 
Quels sont les centres de recherche dans lesquels vous travaillez ?
 
Le centre de recherche pour les plantes alimentaires se situe à Eindhoven. Nous avons des fermes verticales. Nous sommes sur le hi-tech campus d’Eindhoven mais malheureusement, nous ne pouvons pas cultiver de cannabis à cet endroit. Il faut une licence spéciale pour cultiver du cannabis pour la recherche. Certains de nos partenaires ont cette licence pour d’autres centres de recherche. Nous travaillons avec des consortiums. Ce sont des industriels qui se réunissent pour monter des centres de recherche car ça coute extrêmement cher. Nous travaillons avec un consortium avec notamment les marques Plagron et Sensi Seeds. Nous travaillons également avec une autre consortium dans un endroit proche de La Haye qui doit démarrer ses recherches en janvier 2024 avec beaucoup de partenaires dont Paradise Seeds pour les génétiques. Nous avons également fait des recherches par nous-mêmes. Nous avons travaillé avec l’Université de Wageningen en Hollande qui a des installations en indoor et en outdoor.   
 
Comment menez-vous vos recherches ?
 
Nous travaillons sur le data mais nous devons aussi valider nos recherches en conditions réelles. C’est pour cette raison qu'en plus des centres de recherche, nous travaillons aussi en partenariat avec des cultivateurs de cannabis. Nous leur proposons de faire des essais pour valider nos recherches. Le but est de proposer des solutions innovantes. Nous sommes actuellement dans un phase où beaucoup de nos recherches sont en train d’être validées. Nous travaillons avec des cultivateurs au Québec, aux États-Unis et j’espère bientôt en France.
 
En quoi consistent exactement vos recherches sur le cannabis ?
 
Nous travaillons avec des partenaires qui nous fournissent des substrats et nous testons différents systèmes de culture. Nous sommes responsables de la partie lumière. Nous établissons une stratégie d’éclairage en fonctions des objectifs de la recherche. Nous avons par exemple travaillé sur la propagation, sur les pieds-mères en interaction avec la lumière. Nous avons également fait des recherches pour savoir comment améliorer l’uniformité des cannabinoïdes en fin de floraison. Nous avons aussi travaillé sur l’éclairage des serres. Pour chaque projet, nous avons une stratégie d’éclairage adaptée.
 
Vous cultivez vous-même le cannabis pour vos recherches ?
 
Oui, je m’occupe moi-même de récolter les plantes, du trimming et je suis chargé de prélever les échantillons pour les tests. Nous travaillons en équipe et nous utilisons des technologies comme les capteurs durant la culture pour gérer le climat.
 
Comment mesurez-vous l’intensité lumineuse ?
 
Nous utilisons des spectromètres pour mesurer la lumière. L’unité de mesure des plantes est en micromole par mètre carré par seconde.   
 
Pouvez-vous nous parler de résultats de vos recherches ?
 
Nous avons beaucoup de données sur la quantité d’éclairage nécessaire pour cultiver. Nous pensons que la quantité d’éclairage recommandée par les entreprises ou voulue par les cultivateurs est souvent trop élevée. Baisser la quantité d’éclairage permet d’améliorer la qualité des fleurs. Une de nos recherches concerne l’éclairage intercanopée qui permet de donner plus de lumière aux branches latérales en supprimant les zones d’ombre. C’est intéressant pour certains types de culture. Nous utilisons des lampes de 2m50 de longueur. On augmente le rendement pour certains cultivars et on a une meilleure qualité de fleurs. Nous travaillons aussi sur la vigueur des clones. Nous avons deux recettes lumineuses pour les clones avec des spectres différents. La technologie des leds est arrivé à maturité. Il y aura peu d’amélioration dans le hardware mais on peut améliorer les stratégies d’éclairage. Nous recherchons actuellement des cultivateurs sous serre, notamment de CBD, pour valider nos modèles d'éclairage intercanopée.
 
celine.nicole@signify.com

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