La consommation de cannabis peut-elle provoquer une thrombose?

Soft Secrets
22 Sep 2014

L'artérite du cannabis?


L'artérite du cannabis?

Décrite pour la première fois en 1960, on suppose que l’affection présumée appelée artérite du cannabis a touché environ soixante individus depuis lors. Cette pathologie est censée toucher les gros fumeurs de cannabis au long cours en provoquant une inflammation des parois des artères périphériques, et a été impliquée dans des cas de nécrose graves, dont certains ont nécessité une amputation des membres atteints.

Malgré les preuves suggérant que cette pathologie a un lien avec le tabagisme, certains considèrent que l’effet du cannabis joue un rôle unique. En 2001, une étude française présentait dix nouveaux cas, tous survenus chez des hommes âgés en moyenne de 23,7 ans. Ces patients présentaient tous une nécrose des mains ou des pieds consécutive à une ischémie distale subaiguë, ou une perte modérément soudaine de circulation sanguine dans un membre.  Malgré le traitement, quatre patients ont finalement dû être amputés.

Lien avec le tabagisme

 En raison de l’effet vasoconstricteur connu du cannabis, les chercheurs ont conclu que la consommation régulière des patients avait joué un rôle essentiel dans l’évolution de leur maladie. Ces hommes étaient tous des fumeurs modérés, il est donc impossible d’évaluer précisément le degré de responsabilité imputable au cannabis.

Toutefois, bien que la plupart des chercheurs dans le domaine de l’artérite du cannabis n’ait étudié que des patients qui fumaient également du tabac, une autre étude française de 2011 a permis de documenter le cas d’une femme âgée de 36 ans atteinte d’une artérite, qui avait vécu une exposition prolongée au cannabis, mais pas au tabac. Dans son cas, l’arrêt de la consommation de cannabis a provoqué une amélioration rapide des symptômes.
Une autre étude, toujours française, décrivait le cas d’un homme âgé de 36 ans sans aucun antécédent de tabagisme qui avait développé des lésions nécrotiques aux orteils, prétendument imputés à sa consommation durable de cannabis de longue date. N’ayant pas réussi à réduire sa consommation, le patient a développé une ischémie de la jambe gauche qui s’est traduit par une amputation.

Cannabis et vasoconstriction

On a longtemps supposé que le cannabis pouvait provoquer une vasoconstriction, au cours de laquelle les parois des vaisseaux sanguins (en particulier les artères et les artérioles) se contractent, rétrécissant le canal et limitant le débit sanguin circulant dans les vaisseaux. Pour les plus de 65 ans, une étude a conclu que le risque de crise cardiaque dans l’heure suivant la consommation de cannabis était multiplié par cinq. Même chez les individus plus jeunes, plusieurs cas de crise cardiaque et d’accident vasculaire cérébral (AVC) ischémique (provoqué par une baisse soudaine du débit sanguin vers le cerveau) ont été imputés à la consommation de cannabis.


Dans une étude française menée sur 48 jeunes adultes ayant subi un AVC ischémique, 21 % présentaient une sténose intracrânienne multifocale ou de multiples rétrécissements des artères crâniennes. Parmi ces 21 %, tous étaient des consommateurs de cannabis, et bien qu’ils n’en présentaient pas tous les symptômes, la majorité d’entre eux était affectée d’une sténose intracrânienne multifocale. Sur toutes les causes démontrées, dont le cardioembolisme et l’athérosclérose, cette forme de sténose était la plus courante. Les chercheurs ont donc conclu que la consommation de cannabis pouvait être un facteur important contribuant à l’AVC ischémique chez les jeunes adultes.

Problèmes pour établir des liens de causalité

Bien qu’il puisse y avoir effectivement un lien entre la consommation de cannabis et la vasoconstriction, la taille de l’échantillon dans cette étude en particulier était trop réduite pour tirer des conclusions valides quant à la relation avec l’AVC ischémique. En outre, la plupart des consommateurs de cannabis en France consommant également du tabac – le tabac étant aussi connu pour être un vasoconstricteur – des études complémentaires devront être entreprises avant de pouvoir établir un lien de causalité. En fait, la grande majorité des études menées sur l’artérite du cannabis a été effectuée en France où les lois sont strictes et les opinions politiques défavorables dans l’ensemble, et la probabilité de partialité des études est très élevée.
La grande similitude entre l’artérite du cannabis et la thromboangéite oblitérante (ou maladie de Buerger), la coagulation progressive des artères périphériques associée au tabagisme (même pour les variétés non fumées), conduit bon nombre de personnes à considérer que les deux maladies ne sont pas distinctes, et que l’effet du cannabis est au mieux synergique. Des cas avérés d’artérite du cannabis non concomitante (non associée) au tabagisme ne sont pas assez nombreux pour établir un lien réel.

Les contaminants peuvent-ils être mis en cause ?

Il est également possible que l’incidence élevée de cette maladie en France soit due à l’utilisation répandue d’un contaminant, plutôt qu’au cannabis lui-même. En fait, l’arsenic a été évoqué parmi les contaminants possibles. Dans les sols fortement azotés, il a été démontré que l’assimilation par le système racinaire du cannabis était plus élevée. De manière distincte, les apports en eau polluée par de l’arsenic ont été impliqués dans des cas de nécrose racinaire ou « pied noir ». Le fait que la majeure partie du cannabis consommé en France l’est sous forme de haschich, qui est souvent frelaté et mélangé à des additifs très dangereux, renforce l’hypothèse selon laquelle les contaminants peuvent jouer un rôle dans l’artérite du cannabis.

Relation complexe entre le système cardiovasculaire et le système endocannabinoïde

Par ailleurs, nous disposons de preuves qui contredisent bon nombre des principes sous-jacents de l’artérite du cannabis. Plusieurs études ont notamment démontré que le THC, l’anandamide et le cannabidiol anormal provoquaient une vasodilatation plutôt qu’une vasoconstriction, en provoquant un relâchement des muscles lisses des parois artérielles.  Les cannabinoïdes atypiques peuvent également provoquer une vasodilatation. Les vasodilatateurs favorisent la réduction de la pression sanguine et l’augmentation du débit sanguin dans les tissus périphériques. Ces cannabinoïdes ont également souvent des effets anti-inflammatoires notables. En outre, nous disposons de données qui suggèrent que certains cannabinoïdes pourraient avoir des propriétés anticoagulantes, qui impliquent habituellement une réduction du risque de maladies apparentées à la thrombose.

 Il sera nécessaire de mener des recherches intensives sur les interactions extrêmement complexes entre le système endocannabinoïde et le système cardiovasculaire avant de pouvoir tirer des conclusions définitives. Le degré selon lequel les cannabinoïdes peuvent affecter une fonction vasculaire en fonction de leur dosage peut différer, de même que le ratio suivant lequel ils sont présents. Un cannabinoïde peut également avoir un effet vasoconstricteur dans certaines parties du corps et un effet vasodilatateur ou neutre dans d’autres parties. Par exemple, on suppose que chez le rat le THC provoque un effet vasoconstricteur dans les artères rénales et un effet vasodilatateur dans les quartiers arrière.

Malgré les preuves établissant un lien entre l’effet de certains cannabinoïdes et la vasoconstriction des artères, le statut de l’artérite du cannabis en tant que maladie au sens propre peut être sérieusement remis en question. La recherche future établira peut-être un lien définitif, mais la rareté des patients n’ayant pas fumé du tabac de manière concomitante complique grandement la recherche sur cette pathologie, et la rend de loin moins prioritaire que les thromboses imputables au tabagisme.

Source : sensiseeds
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